Dès l'introduction de ce livre, on constate que l'on n'est pas dans une bien pensance moderne et de bon aloi. Mais un ton sincère n'est-il pas préférable à un assujetissement idéologique au politiquement correct?
«Les Français qui arrivent aux tirailleurs, écrit un vieil officier qui y a longtemps servi, débutent en général, quel que soit leur grade, par s'engouer de leurs hommes. Leur manière de se tutoyer, la liberté de leurs allures, leurs jeux, leur langage, leur naïveté, tout chez eux porte naturellement à l’indulgence. On trouve que les tirailleurs sont de grands enfants et l’on a presque toujours une raison pour excuser leurs fautes légères que le roumi ne manque pas de mettre sur le compte de l'ignorance.
Le roumi a quelquefois raison, mais souvent aussi, il se trompe, surtout s’il a affaire à un Ouled Plaça.
Quelque temps après, quand on croit les mieux connaître, quand on a reçu quelque reproche par leur faute, qu'on a pu remarquer que chez eux la malice dépasse parfois l'ignorance, on finit par tomber à leur égard dans l'extrême contraire. On ne constate plus alors que leurs travers, leur maladresse, leur manque d'éducation. Leurs défauts éclipsent leurs qualités, leurs naïvetés sont prises pour des sarcasmes, leur langage même devient insupportable et l'on finirait par les détester, s'il était possible de détester des hommes que l'on élève pour les conduire au combat.
On reste longtemps dans cette opinion extrême, à moins que des circonstances de guerre ne viennent hâter le retour à des sentiments plus modérés et plus justes.
C'est en apprenant à les bien connaître qu'on apprend à les aimer.»
Titre | Auteur | Editeur | Année | nb dePages |
Historique du 2e régiment de tirailleurs algériens | Lieutenant Maurice Martin | H. Charles-Lavauzelle |
1894 | 574 |